
DIES IRAE
“Dies Irae” met en évidence une déclaration de perte, une lamentation, une ombre sonore. L’appropriation d’un hymne de deuil comme la conséquence vibratoire du phénomène de disparition.
Chant grégorien créé par des moines catholiques vers le XIIIe siècle, il était utilisé pour les messes des morts, Dies irae en latin, jour de colère, c’est le jour où les catholiques croient que Dieu jugera les morts et décidera s’ils iront au paradis ou en enfer pour l’éternité. Repris plusieurs fois, notamment, dans les requiem de Mozart et de Verdi, en extraient les paroles chez Berlioz, et en la modifiant chez Ysaÿe, Dies irae est devenue une espèce d’ hymne pour des moments détresse grâce à sa connotation funèbre. Je m’intéresse aux références implicites, en termes lacaniens, “l’interdit” qui viennent enrichir le sens musical d’une signification extra musicale.
Les propriétés d’oscillation d’un trou noir sont étonnamment similaires à celles d’une cloche ou d’un diapason. Tout comme une cloche a une tonalité et un timbre uniques, déterminés par sa taille et sa composition, chaque trou noir sonne avec une hauteur fondamentale et une durée uniques qui dépendent de sa masse et de sa vitesse de rotation.
Le 9 septembre 2003, des astronomes utilisant l’observatoire à rayons X Chandra de la NASA ont découvert, pour la première fois, des ondes sonores provenant d’un trou noir supermassif. La “note” est la plus grave jamais détectée à partir de n’importe quel objet de notre univers. Le trou noir réside dans l’amas de galaxies de Perseus situé à 250 millions d’années-lumière de la Terre. La hauteur des ondes sonores est traduite dans la note de si bémol, 57 octaves en dessous du do médian. Cette fréquence est plus d’un million de milliards de fois supérieure aux limites de l’audition humaine, ce qui rend le son trop grave pour être entendu.
Puisque ce qui ne peut pas être entendu est traduit et donné un sens, dans ce projet, je travail en observant les métaphores musicales vis-à-vis des données des trous noirs. Images archivées et des schémas explicatifs, sont extraites et imposées sur des portées, générant des notations. Dans le cadre de ma residence a la Cite International des Arts, je travaillai avec Jonathan Orland, saxophoniste, et Catharina Adam sur une partition cartesiano-gregorianne en si bémol produit lors de ma residence, en dialogue avec des motif de Dies Irae. Est-ce que l’espace-temps réagit comme nous par rapport à la perte, est-ce que nos comportements psychologiques, nos pathologies, suivent finalement les lois physiques?



